La citation en exclusion

Pour protéger votre société, quand vous êtes associé à 30 % ou plus, vous pouvez être amené à prendre la décision radicale et irréversible d’exclure un associé(e). Oui vous avez bien lu. 30% suffisent.

En Belgique, si vous avez 30 % d’une société, vous avez donc le pouvoir de virer celui qui a 70 % des actions si les conditions ci-dessous sont réunies.

L’objectif ici est donc de dégager une personne au cout le plus bas possible le plus rapidement possible.

Cette forme de citation est une des 5 possibilités pour protéger ses intérêts.

La base légale en droit belge se trouve dans le Code des sociétés et des associations à l’article 2.63 du Code des sociétés et des associations (CSA) :

« Un ou plusieurs actionnaires d'une société à responsabilité limitée – ou d’une société anonyme - détenant ensemble des titres représentant 30 % des voix attachées à l'ensemble des titres existants, ou auxquels 30 % des droits aux bénéfices sont attachés, peuvent demander en justice, pour de justes motifs, qu'un actionnaire transfère ses titres aux demandeurs. »

 

Qu’est-ce que la citation en exclusion ? 

La citation en exclusion est le procès qu’une personne actionnaire peut faire quand elle veut exclure un actionnaire de leur société commune. Elle peut agir de la sorte s’il n’y pas de clause de sortie prévue dans les statuts de la société ou dans un pacte d’actionnaires (ce qui est le cas 9 fois sur 10 en pratique).

C’est la solution extrême quand un accord amiable n’est pas possible. Une exclusion est une sanction pour la personne qui le subit. Mais c’est bien sûr toujours mieux qu’une dissolution de la société résultant d’un désaccord entre associés où la valeur entrepreneuriale créée disparait.

Si vous avez la chance qu’une clause d’exclusion soit prévue dans les statuts de la société, vous avez votre destin en mains. Vous pouvez organiser et tenir une assemblée générale pour voter une exclusion majorité contre minorité.

Bien sûr il est nécessaire que les choses soient faites dans les règles de l’art pour ne rien laisser au hasard. Les enjeux pour les actionnaires restants et pour l’exclu sont colossaux. Les risques sont à bien maitriser.

 

Comment obtenir gain de cause devant le tribunal ? 

Pour un procès en exclusion, l’actionnaire voulant exclure l’autre personne a une charge de la preuve plus importante que dans le cadre d’un procès en retrait.

Il doit construire un important argumentaire écrit avec des preuves de l’effet négatif de l’autre actionnaire sur la société. Voire sur leur relation entre actionnaires. Il lui revient de convaincre le juge que la personne à exclure est réellement nuisible pour les intérêts de la société. La citation en retrait est plus centrée sur les intérêts personnels de celui ou celle qui souhaite quitter.

L’actionnaire agissant au tribunal demande de condamner l’autre actionnaire - à l’origine de la mésintelligence grave et irrémédiable - de sortir de la société comme actionnaire.

Ça signifie que vous vous obligez à forcer l’autre actionnaire à vous vendre ses actions. Oui vous avez bien compris. Dans pareil cas, c’est à vous de payer vu que c’est que vous qui souhaitez le départ de l’autre. Il est donc inopportun d’aller au tribunal si vous n’avez pas d’écrit prouvant votre thèse. Ce serait une perte de temps et d’argent.

 

Le 1er combat : les justes motifs

En théorie, les tribunaux doivent déclarer une demande d’exclusion fondée sur base d’une simple « désunion irrémédiable » entre actionnaires.

En pratique, on constate qu’il est vital d’avoir un dossier blindé démontrant que l’autre actionnaire est à exclure.

Pareille action ne s’improvise pas du jour au lendemain. Elle demande une préparation minutieuse pour pouvoir obtenir ce qu’on veut du magistrat. La décision du juge acceptant ou non « les justes motifs » est capitale pour la suite.

Soit on l’obtient et l’autre est exclu. Soit le juge le refuse et l’autre reste actionnaire de la société. Si vous avez perdu le combat des justes motifs, il y a possibilité d’aller en appel. Mais ça prend plusieurs années pendant lesquelles l’autre est toujours dans vos pattes.

Maintenant si la partie adverse commet l’erreur d’envoyer des courriers incendiaires, c’est bénéfique pour la personne qui souhaite l’exclure. C’est plus simple de convaincre le juge que ce chef d’entreprise n’est plus à sa place dans la société. A ce moment le combat de justes motifs se simplifie.

 

Les étapes clés : compétence du tribunal et rôle de la société  

Seul le président du tribunal de l’entreprise du siège de la société, siégeant comme en référé, est compétent pour analyser la demande de retrait.  

La société est également partie au procès. Si on oublie de mentionner la société dans le papier officiel pour démarrer le procès (la citation en exclusion), on est obligé de l’attirer ensuite dans le procès pour que le jugement soit valable à son égard.

En clair, elle doit être citée à comparaître en tant que partie à la procédure dès le début – à nouveau - pour éviter de perdre du temps.

Une fois le premier combat des justes motifs gagné et la personne exclue, reste à savoir combien vous allez devoir lui payer. Ce n’est pas un détail vu que c’est vous qui payez de votre poche et non pas avec l’argent de la société. Il arrive que certains clients doivent faire un montage bancaire pour payer l’exit de l’autre actionnaire à défaut de fonds personnels suffisants. Néanmoins, reprendre le contrôle de la société n'a pas de prix. Vous avez alors les mains libres.

 

Le 2ième combat : le prix à payer le plus bas possible

Les articles 2 :66 et 2 :67 du Code des sociétés et des associations traitent en profondeur de cette question. Leur analyse contient une grande surprise. Même si un pacte d’associés ou une clause dans les statuts existent, c’est d’office le juge qui a le dernier mot pour déterminer souverainement le prix qui sera payé à l’actionnaire exclu.

C’est assez dingue à réaliser en pratique. Vous pensez qu’ « il n’y a qu’à » appliquer les textes signés devant notaire ou signés entre vous. Alors qu’en fait le juge fait ce qu’il veut. D’où l’importance de s’arranger à l’amiable quand c’est possible.

Pour fixer le prix de cession, il est nécessaire d’effectuer une valorisation de la société à une date de référence. En cas d’absence d’accord entre parties ou en cas d’absence de jugement intermédiaire au début de procès sur ce point, cette date de référence est fixée à la fin du procès.

Concrètement, si l’associé que vous voulez virer est un boulet qui ne travaille plus dans la société, toute la valeur que vous donnez à la société pendant le procès lui sera profitable. C’est un non-sens économique.

Pour la justice en Belgique, le paiement se fait donc lors du transfert des actions à la fin du procès. Sauf si vous avez réussi à faire fixer la fameuse date de référence à un moment plus favorable au début de procès. C’est un des enjeux les plus importants de ce que contient un conflit entre actionnaires. C’est le deuxième combat à gagner.

 

Les autres types de procès possibles sont :

 

Tout dépend de votre situation pour voir comment agir au mieux avec quel procès et à quel moment.

 


 

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